NO DARSE POR VENCIDO

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" SIEMPRE HAY QUE ESCOGER EL CAMINO CON CORAZON , LO CONTRARIO ES VIVIR EN EL ENGAÑO ¨

miércoles, 26 de junio de 2013

矢原 美紀夫 MIKIO YAHARA



矢原 美紀夫 MIKIO YAHARA

Né le 4 avril 1947 dans la préfecture d'Ehime au Japon
Issu de l'université de Kokushikan
Chef instructeur de la Karatemomichi World Federation (KWF)
8e DAN

(Ibuki Tawara)     Chaque année de plus en plus de monde pratique le Karate, il y a un mouvement pour en faire un sport olympique. Quelle différence avec l’époque où vous étiez apprenti (Kenshusei) ou jeune instructeur (shido-in)?

 (Mikio Yahara)     En un mot, le Karaté est devenu plus un sport qu’un art martial. En ce sens, il s’est propagé et a été découvert par beaucoup, il est sorti d’un groupe restreint de pratiquants.

Il y a 40 ans, quand j’avais 23 ans et que je venais d’entrer comme apprenti instructeur à la JKA, on a démarré les compétitions contre différentes associations de Karaté. A cette époque, comme chaque école avait son propre style et sa philosophie personnelle du Karaté, c’était fascinant d’observer du Kumite entre des compétiteurs qui se tenaient chacun dans des positions différentes et combattaient avec leurs techniques traditionnelles. Par exemple, certains se tenaient en nekoashidachi pour contrer les attaques avec un coup de pied alors que d’autres étaient solidement ancrés en fudo-dachi. Chacun suivait son propre style et représentait sa voie du Karaté de manière unique.

Ces dernières années cependant, dans les tournois officiels, le but est de marquer le plus de points possible et les techniques ou les styles montrés dans ces Kumite sont les mêmes. La plupart des Kumite est arbitrée comme un jeu, et l’unicité et l’originalité a disparu depuis. Il est décevant de voir le Karaté perdre sa forme originelle, celle d’un art, à travers les années.

D’un autre côté, à travers cette popularité rapide, le Karaté est devenu un sport fascinant pour des hommes et des femmes de tous âges.

(IT)   Pour vous, qu’est-ce que le Karaté ? Pourriez-vous partager des expériences à la fois positives et négatives de votre entraînement ?

(MY)   Le Karaté représente toute ma vie.  Sur mes 62 ans de vie, j’ai été engagé dans le Karaté pendant 55.  Forcément, mon esprit, mon regard sur la vie, mon comportement, la façon dont je travaille ; tous les aspects de ma vie ont été acquis à travers la pratique du Karaté et je n’en ai jamais rien regretté. Les arts martiaux trouvent leur origine dans les enseignements du confucianisme. Le respect des parents et des anciens et les valeurs familiales sont absolues. Un élève ne doit jamais oublier d’honorer son professeur.

(IT)  Dans de précédentes interviews, on apprend que votre Karaté a été grandement influencé par Yano sensei. Mis à part Yano sensei, quels sont les autres professeurs qui vous ont inspiré ? 

(MY)  Effectivement, durant mes années d’apprentissage, Yano sensei m’a grandement influencé sur tous les plans. A cette époque, avec Yano sensei, j’ai développé un esprit plus fort que la peur, au-delà de la mort. D’un point de vue technique, j’ai appris la dynamique à partir de la rigidité avec Yano sensei, la flexibilité dans les techniques avec Abe sensei, les coups de pieds tranchants comme des rasoirs et une grande agilité avec Ueki sensei, des techniques impliquant la torsion du corps avec Asai sensei et, plus récemment, par notre assistant chef instructeurde la KWF Isaka sensei, j’ai appris les dynamiques de déplacement du centre degravité de mon corps. Il me reste encore beaucoup à apprendre.


Ueki Masaaki 植木 政明 versus Yahara Mikio 矢原 美紀夫



Mikio Yahara 矢原 美紀夫 et Keiko Abe 阿部 圭吾


(IT)  De quelles situations est née votre grande variété de techniques comme les “change-up moves” ou les “Attaques surprises” ? Quelqu’un vous a-t-il amené à créer ces techniques ? 

(MY)  Sans les compétences de base, vous ne pouvez créer aucun mouvement artistique et spontané. Quand vous arrivez à dépasser les techniques de base, alors vous commencez à créer ou changer vos techniques. Il n’y a alors plus de différence avec le mouvement spontané. Personne ne m’a enseigné ces techniques. Quelle que soit la situation, même dans la pire adversité, ma volonté de ne jamais arrêter de combattre positionnera automatiquement mon corps, me fera tourner et répondre à mes opposants. Alors oui, on peut appeler ça une attaque surprise.

(IT)     Sur quel type de “Kime” concentrez-vous votre travail ?

(MY)  Le plus important dans le Kime est d’être capable d’abattre la cible avec une seule frappe. A la KWF nous avons établi notre propre méthode d’entraînement afin d’acquérir cette technique particulière. 

(IT)  Vous êtes devenu célèbre pour votre magnifique “Unsu”. Pourquoi avoir choisi “Unsu” parmi les autres Kata ? Et sur quels aspects concentrez-vous votre attention quand vous en faites la démonstration ? 

(MY)  J’ai choisi Unsu parce que mes capacités physiques s’accordaient avec ce Kata en particulier. De plus, les autres Kata étaient trop ennuyeux à exécuter. Pendant l’exécution, le plus important est de maintenir l’intensité ou le « ki » jusqu’à la dernière seconde. Si vous ne pouvez maintenir le ki, alors le Kata devient un « Kata mort ». Il y a plusieurs passages, sauter dans les airs, couché par terre, avec des rotations de hanches et où le corps bouge très intensément. Pour cela, vous devez contrôler chaque technique et maintenir un ki intense, or il peut être facilement interrompu. Il est impossible d’agir sans une concentration extrême et une capacité physique exceptionnelle. En cela, je vois Unsu comme un nuage, un cumulonimbus car il doit être frénétique, en ébullition.





Certains le voient comme un type de nuage présent dans le ciel d’automne, mais j’ai fait le choix osé de le présenter dans sa version cummulonimbus.

(IT)   Vous avez impressionné plus d’une audience avec vos combats intenses. Dans quel état d’esprit vous placiez vous à l’approche de ces combats et y avait-il une différence entre le Kumite et le Kata ?

(MY)  Évidemment, il est important de gagner dans n’importe quelles circonstances. Mais pour moi, le plus important au-delà de gagner ou perdre, est de savoir dans quelle mesure j’ai pu bouger et combattre en accord avec mon approche idéale du Karaté. Dans cet univers idéal de Karaté, l’idée principale de la technique est « comment faire de n’importe quelle frappe, petite ou faible, une frappe massive ».  Je pense qu’il en va de même pour tout le monde. La différence se trouve dans comment vous allez magnifier votre corps et faire vivre le mouvement en trois dimensions, que ce soit dans l’attaque ou la défense, et ce quelle que soit la situation. Bien entendu, afin d’atteindre cela vous devez avoir une grande capacité physique et aussi de l’audace. Rétrospectivement, en repensant à mes anciens combats, la plupart du temps je n’étais à la hauteur de mes attentes.




Je dirais « Ki comme un état d’esprit », que ce soit pour le Kumite ou le Kata. Dans le Kata, c’est un ki de continuité, on doit le maintenir afin d’exécuter le Kata et à aucun moment on ne peut se permettre de le perdre. Dans le kumite, parfois je libère toute mon intensité et parfois je prends le temps de me détendre, en plein combat. Il m’arrivait même de bourdonner en essayant de me débarrasser de ma hâte et de ma nervosité. Ce n’était pas pour faire l’idiot, c’était une manière d’atteindre l’état spirituel de vide. Car en atteignant cet état, je pouvais alors concentrer et maximiser ma puissance au moment de l’attaque.

(IT)   Ressentiez-vous l’anxiété dans votre entraînement quotidien, lors de grands Kumite ou dans des combats de rue ? Avez-vous une méthode pour vaincre cette peur ?

(MY)   En toute circonstance, j’éprouve toujours dans un degré plus ou moins important un sentiment de peur. Pour ce qui est de conquérir cette peur, un entraînement quotidien vous rendra confiant. Vous allez alors commencer par ne plus sentir cette peur, et si jamais vous deviez la ressentir elle ne durera pas longtemps. Au contraire, si on ne construit pas sa confiance la peur va grandir, peut-être même jusqu’au jour où vous ne serez plus en mesure d’affronter quoi que ce soit.


Séminaire KWF - Luton 2011


(IT) Selon vous,  quels points communs peut-on retrouver dans le Shiai, le combat de rue et les affaires ? 

(MY)  Leur point commun est que vous devez avoir un esprit engagé à la mort. Si vous n’avez pas peur de mourir, vous pouvez réussir n’importe quoi. Chaque être humain meurt. Un artiste martial doit avoir comme but suprême d’être capable de contrôler sa propre mort à chaque moment de sa vie. Il faut être capable de laisser de côté les moments du passé, du présent ou du futur. Qu’il n’y ait plus rien qui puisse vous faire peur. Que vous soyez ou non capable de faire cela, posséder cet état d’esprit est absolu.

(IT) Cela fait de nombreuses années que vous voyagez partout dans le monde pour enseigner le Karaté. Sur quels points insistez-vous dans votre enseignement, et cela change-t-il selon le pays ou l’époque ? 


(MY)   Je reviens toujours aux bases, aux fondamentaux. Beaucoup de pratiquants admirent des techniques visuellement impressionnantes et pratiquent le Kumite sans apprendre les bases. Ils pensent qu’ils sont de bons combattants mais ont l’air de ne combattre personne, comme du shadow-boxing. Le Kumite se réalise en explorant les bases du Karaté et ne peut exister qu’à travers l’application des techniques de base. Quand je suis invité à m’entraîner avec d’autres personnes dans d’autres pays, je mets toujours un point d’honneur à enseigner les bases, les bases de la KWF bien sûr.


Séminaire KWF - Luton 2011


(IT)   D’où vous viennent vos méthodes d’entraînement ?

(MY)  En Karaté mes racines viennent du Shotokan. A partir de cette fondation, j’essaye de me concentrer nuit et jour sur comment vaincre avec un seul coup. Les techniques acquises avec un entraînement basé sur cette approche peuvent permettre de vaincre votre adversaire avec un seul coup. C’est la seule idée, le seul but donc il n’y a pas à proprement parler de méthode.

(IT)     Qu’est-ce qui rend le Karaté KWF unique ?

(MY)  Comme en témoigne sa cruelle histoire, le Karaté sert à terrasser votre adversaire avec un seul coup sans porter d’arme. La question est comment réaliser cela face à un adversaire qui tient une arme avec les seules possibilités du corps humain. Dans la voie de la KWF, nous développons le potentiel physique à son maximum sur chaque aspect du Karaté à travers la compression de chaque partie du muscle nécessaire jusqu’à la limite, afin de générer une puissance d’impact instantanée surl’opposant. La raison de cette compression est la même que le mécanisme d’une balle de pistolet : plus il y a de poudre dans la cartouche et plus vous aurez de puissance explosive. C’est un aspect unique à la KWF et son application fait le lien entre la physique mécanique et les techniques de Karaté. 

(IT) En Karaté KWF, “Oi-zuki” est l’une des techniques les plus importantes en Kihon, et “Heian Shodan” le Kata le plus important. Pourquoi ?  

(MY)  La KWF considère que “Oi-zuki” et “Oi-geri” sont les techniques les plus importantes car elles permettent physiquement de générer le maximum de puissance. C’est pourquoi Heian Shodan est le Kata le plus important, car il contient tout ce que nous poursuivons à la KWF. Vous comprendrez le sens de tout cela en venant vous entraîner avec nous. 


Séminaire KWF - Luton 2011


(IT)   Sur quels points insistez-vous lorsque vous formez les instructeurs du Dojo principal ? Faites-vous alors quelque chose de spécial ? Qu’attendez-vous de vos instructeurs ?


(MY)  A notre entraînement, nous pensons que le plus important est d’appliquer les dynamiques des 5 parties du corps (bras et jambes à droite et à gauche, hanches) à chaque technique de façon correcte. J’attends des instructeurs qu’ils développent leur volonté avec passion, sans être trompés par les dernières tendances de l’époque. 

(IT)   Nous (Shaun Banfield and Emma Robins) avons suivi un séminaire d’Isaka sensei l’an dernier, et l’avons trouvé très intéressant. En quoi les méthodes d’entraînement d’Isaka sensei inspirent-elles le Karaté KWF ?

(MY)   La méthode de déplacement du centre de gravité qu’Isaka sensei a développé a transformé ma vision du Karaté. On ne peut le ressentir sans s’entraîner sous son instruction. Ce mouvement unique du centre de gravité a donné naissance à ma méthode des dynamiques des 5 parties du corps, et la fusion de ces 2 méthodes a donné naissance à la compétence du « Un coup un mort » propre à la KWF.


Séminaire KWF - Luton 2012



Séminaire KWF - Luton 2012


(IT) La KWF a un réseau bien établi et des affiliés partout dans le monde, quel est le futur de la KWF ?  

(MY)  Avancer avec une attention passionnée, sans se fourvoyer. S’il y a des sympathisants alors cela deviendra un grand groupe, sinon cela ne m’aura apporté qu’une satisfaction personnelle et disparaîtra. Organiser des évènements et pratiquer ensemble est notre plaisir dans la construction de ce futur. 

(IT)     Quel est votre rêve?

(MY)  Je n’en ai pas. Simplement accomplir au moins à moitié certaines choses que j’aimerais garder pour moi. 

(IT) Pourquoi avoir débuté le Karaté ? Si  vous n’aviez pas fait ce premier pas, quelle genre de personne pensez-vous que vous seriez devenue ?  

(MY)  Enfant, je voulais devenir fort. Comme mon grand frère pratiquait le Karaté, j’ai naturellement poussé la porte du Karaté. Je devais avoir les 5 sens très développés car j’étais bon en dessin, en guitare et je m’intéressais beaucoup à la musique. Je serais alors sûrement devenu un artiste si je n’avais pas été Karateka.  

(IT)   A quoi ressemble votre entraînement quotidien ? Des différences avec le Karaté que vous pratiquiez quand vous étiez apprenti à la JKA ou compétiteur ?

(MY) Mon Karaté a changé ces 10 dernières années. On disait de moi que j’étais “un homme naturellement doté d’un fort esprit dans son corps”, avec de grandes capacités, un “Kime” et une vitesse qui surpassaient les autres dans ma jeunesse. Pourtant, cette rapidité que j’avais dans ma jeunesse décline un peu plus chaque année depuis que j’ai arrêté ma carrière de compétiteur. L’entraînement au déplacement du centre de gravité d’Isaka sensei est impossible sans compresser toutes les articulations et les muscles des 5 segments du corps jusqu’à leur limite. C’est comme le mouvement du piston dans le cylindre, créant une explosion massive d’énergie par compression hydraulique. Une fois ce mécanisme du mouvement appliqué au corps humain, j’ai pu développer une puissance plus grande encore que celle que je possédais dans ma jeunesse. Finalement, je dépendais de ma vitalité quand j’étais jeune, et au fil des ans j’ai développé une vitalité nouvelle à travers mes recherches et ma pratique. Voici à quoi se résume mon entraînement. 

(IT)     Qui respectez-vous le plus ?

(MY)  Je respecte quiconque s’entraîne très dur, jour après jour, chaque jour. Alors que nous vivions dans une culture matérielle où la vie est facile, c’est une chose magnifique et rare de voir des gens s’entraîner dans cette voie. 

(IT)  Merci Sensei de nous avoir accordé votre temps et pour avoir partagé vos expériences et vos idées. 



Ibuki Tawara pour le magazine "www.theshotokanway.com" édition 2010
Traduction par Maxime Martin
Illustrations par Cyril Rodriguez

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